On ne peut jamais s’empêcher complètement de réfléchir. Mais n’est-ce pas le propre de la nature humaine ?
Si nos réflexions aboutissent souvent à des solutions, il arrive que le flot insensé de pensées qui nous habitent finisse par nous coûter de l’énergie.
Aussi, ne pourrions-nous pas rediriger notre esprit pour un meilleur accomplissement personnel ?
Exercice de pensées
Imaginez la scène suivante :
Vous mettez dans le coffre de votre voiture tous vos soucis et problèmes du moment, bref tout ce qui vous trotte dans la tête et qui vous empêche de développer votre potentiel. A présent, visualisez bien les suspensions de l’appareil qui plient sous le poids de toutes les choses, les valises, dont vous vous déchargez. Prenez ensuite le volant et dirigez-vous vers l’autoroute. Sur une belle ligne droite, vous voyez arriver dans votre rétroviseur une voiture en tous points similaire à la vôtre. Elle s’approche puis vous double à vive allure.
Mais pourquoi peut-elle vous doubler si facilement alors qu’il s’agit du même modèle de voiture ? Son coffre est tout simplement moins plein ! De fait, elle est moins lourde et avance bien plus vite que vous.
En d’autres termes, relativiser est un grand mot et représente une des plus grandes découverte du XXème siècle. Toutefois quel est son principe et comment puis-je l’appliquer ?
Relativiser, c’est quoi ?
La relativisation est le fait de fixer un point de vue et de regarder les événements se dérouler à partir de ce point de vue-là. Tenez, par exemple, dans l’exercice de la voiture sur l’autoroute : selon votre point de vue, la voiture s’approche toujours plus puis vous double. De son côté, le point de vue de l’autre conducteur est le suivant : vous vous approchez puis vous disparaissez dans son rétroviseur.
Concrètement, notre point de vue n’est pas isolé. Ce que nous percevons ne correspond pas nécessairement à la situation telle qu’elle se présente réellement. Nous n’avons qu’une vue partielle de ce qui se passe, la nôtre.
Nous avons tous vécu la situation suivante : en classe, nous réalisons que nous n’avons pas fait notre devoir. Nous attendons déjà la punition. A notre grande surprise, l’heure passe et le professeur n’a même pas demandé le devoir. En fin de compte, nous nous sommes tracassés durant tout le cours alors que le maître, lui, a oublié.
En résumé, quelle que soit la situation, trop s’inquiéter ne résout rien. Et cela peut même provoquer une baisse de performance !
Penser moins mais mieux
L’homme est une machine et son esprit aussi. Tout comme on ne peut demander à une smart de faire du 220 km/h, on ne peut demander à notre esprit de faire plus que ce qu’il peut. L’attention est une ressource épuisable.
Cela étant, il semble qu’un état perpétuel d’inquiétudes constitue une perte de temps. Comme la pleine conscience et d’autres méthodes, notamment bouddhistes, le suggèrent, il ne faut s’inquiéter ni du passé ni du futur mais vivre dans le présent. De cette manière, nous atteignons notre pleine performance. Tel un moteur neuf, rien ne nous empêche plus de tourner à plein régime. Si les inquiétudes et regrets se mêlent à notre beau présent, la performance baisse.
Nous savons tous combien il est perturbant de voir surgir du passé un état de fait que nous regrettons ou que nous aurions voulu faire autrement. Aujourd’hui nous savons que si une personne est interrompue dans son travail, il lui faut vingt minutes pour qu’elle retrouve sa pleine capacité et son rendement. Avons-nous vraiment autant de temps à perdre ?
En relativisant, nous pouvons mettre de côté tout ce qui appartient au passé et qui empiète sur le présent.
Se centrer pour relativiser
La capacité de relativiser est celle de savoir mettre de côté les choses qui ne sont pas nécessaires et qui encombrent notre environnement pour avoir une perception réaliste de notre quotidien. Cela peut se faire de différentes manières mais étant donné que la meilleure attaque est toujours la défense, il s’agit de bien se préparer.
Si votre journée de travail s’annonce difficile, il est important de se centrer et de relativiser les choses dès le début de la journée. Essayez une des méthodes ci-dessous.
La méditation est une bonne technique qui permet d’être plus disponible et plus alerte. Si vous le pouvez, commencez par une méditation ayant pour but de bien vous centrer. Ainsi, vous pourrez entamer la journée avec une perspective claire d’où vous vous situez et de ce que peuvent percevoir les autres.
Les méditations “format court” sont particulièrement efficaces au travail. Si vous sentez que votre perception des choses n’est pas la bonne, que votre colère ou vos soucis viennent vous perturber, il est important de se recentrer et de relativiser. Pour ce type de méditation, il suffit de fermer les yeux et de se concentrer sur sa respiration. Pendant une à deux minutes, soyez complètement concentré sur vos inspirations et expirations sans vouloir les contrôler. Laissez toutes les pensées qui vous traversent l’esprit passer leur chemin. Puis reprenez vos activités avec un esprit neutre et frais.
Une autre méthode est celle de noter vos soucis. En voici une illustration:
Avant d’entrer dans une salle d’examen, certains professeurs recommandent la chose suivante à leurs élèves: Avant de tourner votre feuille d’examen, prenez une feuille blanche et notez toutes les choses qui vous font peur ou qui vous tracassent. Cela peut-être les conséquences d’un échec à l’examen ou l’état de votre chien qui ne se porte pas bien.
Peu importe de qui ou de quoi il s’agit, écrivez-le. Une fois que vous avez fini de noter vos pensées perturbatrices, mettez la feuille de côté et à ce moment-là seulement commencez votre examen. Des études ont démontré que les élèves qui font cela ont des performances significativement meilleures.
Certes tout le monde ne passe pas un examen tous les jours. Alors comment peut-on adapter cette méthode à d’autres personnes? Dans un article pour le journal Inc., Glenn Leibowitz expose une tactique utilisée par Julia Cameron, une auteure à succès. Elle préconise d’écrire au moins quinze minutes tous les matins dès le lever. Coucher sur le papier tout ce qui se passe dans notre tête permet selon elle “de nettoyer les débris psychiques entre nous et notre journée.”
Il arrive souvent que notre esprit interfère dans nos activités. Toutefois il existe des solutions pour endiguer le flux continu de notre esprit. Mais que se passe-t-il lorsqu’une situation échappe à notre maîtrise ?
Rien ne va plus
Il arrive que nous sentions dépassés par les événements. Nos mots excèdent parfois même notre pensée. C’est un “trop plein” de petites choses accumulées qui nous fait exploser. Parfois nous arrivons à sentir qu’une goutte pourrait très prochainement faire déborder le vase et nous arrivons à nous ressaisir. Mais il arrive que ce ne soit pas le cas et alors nous explosons.
Prenons l’exemple d’un collègue qui nous exaspère parce qu’il nous paraît fainéant : nous nous énervons contre lui mais ce qui est peut être en tort c’est notre perception de lui. Le discours que nous tenons dans une situation comme celle-là est souvent accusatoire. “Tu ne fais jamais ce que tu dois faire”, “Tu n’es pas responsable”, etc. Ces envolée lyriques ont uniquement une utilité pour celui qui crie. Il peut comme cela vider son sac. Or cela ne règle pas le problème, bien au contraire. Les relations vont se tendre et nous culpabilisons d’avoir été aussi rude avec votre collègue.
Aussi, si vous sentez “la moutarde monter”, adoptez une attitude contemplative. Tentez d’observer ce qui vous arrive comme si vous étiez une personne extérieure. Peut-être sentirez-vous votre pouls s’accélérer ou vos poings se serrer. Dans tous les cas, évitez l’affrontement. Donnez-vous du temps.
Une fois la tension retombée, confrontez-vous à ce qui ne va pas. Si nous reprenons l’exemple du collègue, demandez-lui s’il est disposé à discuter avec vous. Vous devez adopter une approche douce et ne surtout pas entrer dans la confrontation. Gardez un ton calme et aimable. Tentez de comprendre pourquoi ce que l’autre a fait vous a mis dans un tel état. Dans ce cadre, n’oubliez pas que ce n’est pas forcément ce que lui fait ou a fait qui n’est pas acceptable. Votre perception de lui et de l’environnement peut être biaisée notamment par votre état émotionnel. C’est à ce stade qu’intervient la relativisation.
Si vous vous rendez compte que votre collègue fait tout ce qu’il peut et travaille comme il le faut mais que les délais ne sont pas tenus, c’est peut-être que l’estimation de son rendement était trop élevée dès le départ. Vous pourrez peut-être aussi vous apercevoir que c’est votre stress et votre peur de ne pas respecter les délais qui vous conduisent à lui mettre la pression et à limiter ses moyens.
Si le mal est fait et que vous avez déjà “vidé votre sac” contre cette personne, il faut rétablir le contact au plus vite. Plus le temps passe, plus vos relations avec cette personne vont se ternir. Vous ressentez sûrement de la honte, voire de la peur d’être rejeté. Pourtant le collègue concerné ne demande certainement qu’à rétablir de bonnes relations.
Puisque, comme nous l’avons vu plus haut, relativiser c’est aussi réparer, faites le point sur vous-même, sur ce qui n’allait pas, et les raisons de l’incident. Puis allez voir votre interlocuteur, isolez-vous et exposez-lui le résultat de votre introspection. Expliquez-lui calmement pourquoi vous en êtes arrivé à cette altercation. Si vous voulez qu’il vous comprenne, vous ne pouvez lui donner que la moitié des éléments. Il faut aussi veiller à répondre à ses questions de manière honnête. Le point important dans cette situation est de lui donner un moyen de mesurer votre bonne volonté. Vous pouvez par exemple lui proposer de se rencontrer deux fois par semaine pour discuter des dossiers ensembles et établir une meilleur stratégie de travail. Rappelez-vous que bien que cette discussion soit bilatérale, il s’agit d’une conversation entre vous, l’autre et votre égo.
En réalité, relativiser permet de se préparer mais aussi d’améliorer son environnement.
Relativiser, une affaire personnelle
Si nous reprenons tout ce que nous avons vu au dessus, relativiser c’est une affaire qui nous concerne nous.
Sachez faire le vide régulièrement. Partez sur l’autoroute de la vie, le coffre léger. Vos soucis laissés sur une feuille de papier à la maison. Soyez également ouvert aux autres et à leur perception des événements. Ouvrez votre “vous intérieur” pour éviter des frustrations futures.
A ce sujet, nous pouvons “armer” notre “nous intérieur” (par des exercices le matin ou en écrivant nos soucis) pour faire face au monde plus détendu. On le sait, la vie n’est pas un long fleuve tranquille. Mais il s’agit de réparer ce que nous avons cassé et d’apprendre à partir de l’erreur que nous avons commise et de progresser sur la base de nos introspections. Puis on recommence en écrivant ce que nous avons à nouveau fait faux. Nous continuons ensuite à emprunter l’autoroute de la vie, avec un véhicule toujours plus léger.