Addiction: comment la reconnaître et s’en sortir ?

Comment sortir de l'addiction?Nous sommes « addicts » à bien plus de choses que nous ne voulons, ou, ne pouvons l’admettre. Des éléments de notre quotidien, qui semblent au départ innocents, nous sont pourtant néfastes. Mais comme dans la plupart des addictions, en général, il faut que quelqu’un d’autre nous le fasse remarquer pour que nous prenions conscience de son effet néfaste. Alors qu’est-ce que réellement l’addiction? Comment peut-on la reconnaître ? Quelles sont les techniques pour la vaincre et rester en dehors de son influence? Comment est la vie avec moins d’addiction ?

Qu’est ce que l’addiction?

Pour bon nombre d’entre nous une bonne tasse de café fumant nous extirpe de nos rêveries matinales. Ce liquide chaud et foncé nous rend plus attentif, devient notre incontournable compagnon du matin. Toutefois, que peu de gens savent que le café est la drogue la plus consommée au monde. Vous avez bien lu: drogue. Le café est une drogue. Alors bon, on peut minimiser la chose en se disant que d’autre substances sont pires et illégales. Toutefois la réalité est bien là: nombreux sont les junkies du café.

Mais si même le café est une drogue comment peut-on reconnaître tout ce qui est une drogue? La réponse n’est pas si simple. On peut considérer que bien des choses, et non pas seulement des substances, sont addictives. Prenons pour exemple Facebook ou la télévision: Combien de temps passez-vous devant votre écran? Ne ressentirez-vous pas un manque sans eux?

Dans l’exemple du café, l’addiction se fait de manière “biologiquement directe” dans le sens où une tolérance à une substance externe se met en place, et nous devons absorber une plus grande quantité de café pour avoir la même sensation d’attention. Dans le cas d’autres comportements, comme les jeux d’argent ou l’addiction à la pornographie, le mécanisme est encore plus vicieux: nous devenons addict à une substance que nous produisons nous-même. Le fait d’être dans cette situation provoque une production d’hormones qui activent les mécanismes de récompense dans le cerveau.

Ces mécanismes sont identiques à ceux qui sont activés après une bonne heure de course à pied et que nous fait ressentir une sensation de satisfaction par exemple. De fait, si nous n’avons pas ce comportement addictif, nous sommes en manque de récompense. Dans le cadre de l’addiction au jeu, nous allons vouloir jouer plus pour ressentir ce “plaisir” encore un peu plus longtemps.

Bien que intrinsèquement biologique, l’addiction est dépendante de notre environnement social et émotionnel. Voyons un exemple:

Pendant la guerre du Vietnam, 20% des soldats US étaient des consommateurs réguliers d’héroïne. Contrairement à ce que l’on peut penser, 95% des soldats héroïnomanes ne prennent plus d’héroïne et n’ont même pas eu de symptômes de manque une fois rentrés au pays.

Un autre exemple, vous vous cassez un membre et devez rester à l’hôpital quelques temps sous morphine: la plupart des patients ne deviennent pas addicts à la morphine.

Il se trouve que dans la conscience collective, l’addiction est quelque chose de purement biologique. La médecine et la psychologie clament le contraire: c’est un problème d’environnement.

Pendant la guerre du Vietnam, les soldats sont seuls face aux horreurs de la guerre, à la mort et leur propre solitude: l’héroïne est un moyen facile “d’échapper à la réalité”. Mais une fois rentrés chez eux, entourés de leur famille, amis et animaux de compagnie, seulement moins de 5% continuent de se droguer. Le facteur environnemental est sans équivoque le noyau de l’addiction. Il est important de considérer ce point, nous y reviendrons plus tard.

Pour résumer, l’addiction est une accoutumance à une substance (ou une activité qui induit la création de substances) qui donne lieu à une consommation ou un comportement compulsif envers cette substance. Nous avons tous l’image du drogué, shooté aux drogues dures, toutefois, il faut se rendre à l’évidence que l’addiction fait partie de notre quotidien à tous. Nous ne pouvons pas ignorer l’aspect physiologique de l’addiction. Toutefois, la clé se trouve dans notre perception et dans ce qui nous entoure. Mais alors, comment pouvons-nous la reconnaître?   

Reconnaître l’addiction

Dans cette section, nous allons tenter de voir comment identifier nos comportement compulsifs. Pour pouvoir le faire de manière correcte, il faut commencer par accepter une chose qui peut sembler difficile: “reconnaître objectivement que je suis un addict”. Soit, l’addiction est connotée très négativement, et pas totalement à tort. Toutefois, il faut se sortir de l’esprit que l’addiction est une plaie stigmatisante qui ne sera jamais soignée. Nous devons considérer l’addiction comme une prise de conscience à l’attachement à une chose ou une substance qui nous empêche de vivre notre vie à son plein potentiel. Accepter d’être addict c’est le premier pas vers une vie sans addiction.

Prenez n’importe quel comportement, votre activité sur Facebook, la cigarette, le sport, votre sexualité, peu importe, et faites le test suivant: pendant un mois, supprimez-la complètement de votre quotidien. Faites vous la promesse de ne plus faire cela pendant au moins 30 jours. Si vous ne ressentez aucun manque, aucune envie, si petite soit-elle, de retourner vers cet élément supprimé, vous n’y êtes pas addicts. Dans le cas contraire, c’est que vous souffrez d’une addiction dont le degré de sévérité varie.

Vous serez tenté de dire que le fait d’aller sur Facebook une fois par jour n’est pas si grave.  Bien sûr que non ce n’est pas grave. Mais ce que cela implique c’est que vous le faites parce que vous en avez “besoin” en non pas “envie”. Et c’est là que gît une des clé du bonheur.

Dans un monde idéal, sans addiction, tout ce que vous faites est le pur résultat de votre envie, votre volonté consciente de faire cette activité. Boire un café avec un ami, faire du sport, peu importe le comportement, il deviendra une source infinie de plaisir si vous le faîtes avec la volonté. Quelque part, l’addiction nous force à donner de la confiture aux cochons: nous faisons les activités du quotidien sans envie, alors qu’elles sont sources de bonheur, nous n’en profitons pas.

Si après un mois sans café, que vous aviez l’habitude d’en boire au moins 5 fois par jour au bureau avant, et sans envie réelle d’en boire, vous allez prendre un café avec une amie, il se passera la chose suivante: vous allez l’apprécier. Ce sera le meilleur café que vous ayez bu depuis longtemps.

“Alors faut-il que je scanne tout mes comportements pour voir auxquels je suis addict?” Idéalement oui. Certains philosophes et un mouvement récent pour le minimalisme prônent l’adoption d’une vie la plus simple possible. Alors certes nous ne parlons pas de supprimer votre table de salle à manger, mais il y a cette tendance, à raison, de se séparer de tout ce qui nous lie bras et jambes dans une vie qui nous limite.

Alors un comportement après l’autre, un par mois, testez les: en une année vous aurez déjà identifié 12 sources d’addictions potentielles!

“Mais une fois que je les ai identifiées comment les supprimer définitivement?”

Veni, Vedi, Vici : L’addiction

C’est une chose de savoir qu’on ne peut se passer de cigarettes, mais sans solution en fumer une devient plus que tentant. On a vu défiler les méthodes: les patchs, remplacer la cigarette par un verre d’eau, faire des pompes… J’en passe et des meilleures! Bien que certaines puissent marcher, je vous propose une méthode qui va dans l’autre sens. Pour le bien de l’exemple, je vais me concentrer sur un exemple, la cigarette, mais sentez vous libre de remplacer cela par n’importe quelle addiction.

Si on vous propose de remplacer la cigarette par un verre d’eau ou par des pompes ce que vous essayez de faire c’est combler le vide que laisse l’absence de cigarette. Si on tente d’imaginer cela c’est comme si nous réglons le problème de la fonte des glaciers en nous disant qu’il suffirait de remplacer la glace par du plastique blanc. Ça ne marchera probablement pas! Pourquoi?

Ce vide que laisse un comportement compulsif c’est comme une serrure: seul le comportement en question peut l’ouvrir. Quiconque a déjà oublié ses clés sait qu’en principe aucune autre ne marche… C’est bien beau mais que faire? Rien.

Aussi stupide que cela puisse paraître une solution efficace serait de ne rien faire. Toutefois, nous parlons ici de ne rien faire du tout: “Rien de rien”. Simplement contempler.

En effet, une approche contraire à celle de vouloir remplacer le vide de l’activité addictive par une autre plus “saine” est de contempler le vide qu’elle laisse. Si vous avez envie d’une cigarette au bureau par exemple, cessez toute activité. Asseyez vous et dans la mesure du possible essayez quelque secondes de pleine conscience. Comme dans un body scan, tentez de déterminer ce qui ne va pas. Physiologiquement, notez ce qui est différent: fréquence cardiaque plus haute, respiration plus rapide, mains crispées. Psychologiquement, prenez note de vos pensées: vous pensez à la fumée dans vos poumons, à la sensation que vous procure la cigarette… Notez tout cela.

En faisant cela, votre esprit forme petit à petit une “clé de remplacement” à l’addiction. Progressivement, l’envie va diminuer.

Tentez cela à chaque fois que vous ressentez le manque. Vous allez voir que petit à petit, vous aurez de moins en moins besoin de fumer.

Certes cela sera dur, dans le cas d’addiction à des substances vous aurez peut-être des rechutes, ce n’est pas une problème, continuez d’utiliser cette technique, et pas après pas, vous vous sortirez des sables mouvants. Dans tous les cas n’hésitez pas à consulter votre médecin, expliquez lui votre situation, il saura vous aider.

Le deuxième volet important sera votre environnement. Nous entendons par cela votre entourage, comment vous prenez soin de vous-même et votre vie sociale. En effet, les études démontrent l’importance de ce qui vous entoure quand vous souffrez d’addiction. Tentez de vous rapprocher de votre famille, faites vous des amis et prenez soin de vous et prenez soin de votre chez vous.

 

Cela va avoir l’effet suivant: cela vous éloignera de votre addiction. Si vous êtes addict à la pornographie, sortir et faire une soirée entre amis vous empêchera de tomber dans votre addiction (comme les soldats américains seuls face à eux-même aux Vietnam). Tentez de prendre soin de vous-même.

Faire du sport est une activité qui peut se révéler très bénéfique en général, et surtout en période de privation: les endorphines produites par le sport nous rendent satisfaits de nous même plutôt que aigris par l’abstinence. Augmentez votre rythme de sessions hebdomadaires ou engagez vous dans un nouveau sport. Profitez en pour découvrir de nouvelles choses. En plus d’améliorer votre santé, le sport en équipe est un moyen facile de se faire des amis. Et après la session, allez manger avec vos coéquipiers.

Prendre soin de votre habitat est une activité très gratifiante. Réparer le pommeau de douche qui fuyait est par exemple une activité, qui comme toutes celles du dessus, va permettre de stimuler vos mécanismes de récompense et de remplacer un petit peu votre addiction.

“Mais alors comment sera la vie sans être addict à toutes ces choses?”

La vie sans l’addiction: libre

Ne plus se sentir accroché à une substance vous changera la vie. Mais comment continuer à vivre sans se laisser attraper dans une addiction?

Maintenant que vous vous sentez libre de cette addiction, vous voyez concrètement les efforts que vous avez faits pour arriver à cette liberté: pour éviter de retomber dans le piège, appréciez les choses. Dans le cas de fin d’addiction qui sont sans conséquences graves pour la santé (ex. TV, café, Facebook…), tentez de les garder pour les occasions spéciales.

Si vous vous êtes libéré du dictat du café, rien ne vous empêche de prendre une fois ou l’autre un café, mais appréciez-le. Idéalement allez en boire un avec un ami de longue date que vous n’avez pas revu depuis longtemps. Evitez par contre de prendre du café au travail que vous buvez sans même vous en rendre compte.

Dans le cas de fin d’addictions graves et menaçantes pour la santé (par exemple de substances illicites, tabac…) évitez tout contact avec l’ancienne addiction dans un premier temps. Il est indispensable pour vous de vous créer une identité sans cela. Il faut prendre conscience que l’addiction en soi n’est pas définie par le comportement uniquement, mais aussi par tout l’environnement qui l’entoure. Si un héroïnomane sort de sa dépendance, il faut qu’il évite de retourner tout de suite dans la rue où il achetait sa marchandise.

Un autre exemple: vous vous qualifiez comme un fumeur pendant 15 ans. Il est important de vous voir à présent comme un non-fumeur. Alors évitez de sortir du bar avec les fumeurs. Sortez vous de ce groupe qui entoure votre addiction. A présent il y a “moi” et “eux”, et ces deux éléments sont loin l’un de l’autre. Cela aura pour conséquence de vous séparer de gens qui vous sont néfastes et de rencontrer des gens qui sont plus similaires à vous.

Conseils Finaux

  • Confiez vous! Une étape cruciale est celle de partager votre ressenti. Que ce soit à un(e) ami(e) ou à un psychologue importe peu. Le fait de dire à voix haute les choses aura pour effet de vous faire prendre conscience de là où vous êtes. Plus important encore, cela aura pour effet implicite de prendre un engagement à aller mieux, car votre interlocuteur sait que vous n’allez pas bien et va probablement vous demander des nouvelles régulièrement.
  • Lisez sur le sujet! Comprendre les mécanismes spécifiques à votre addiction va vous donner encore plus de clés.
  • Prenez soin de vous! Votre hygiène de vie est importante. Profitez de prendre des habitudes saines, comme courir régulièrement ou manger plus de légumes.
  • Soyez conscients et plein de gratitude! Adoptez une vision de la vie plus douce et plus positive. Sachez faire preuve de gratitude envers les gens qui vous sont chers, et comme eux seront là pour vous, soyez là pour eux.

Références:

http://www.hopkinsmedicine.org/psychiatry/research/bpru/docs/caffeine_dependence_fact_sheet.pdf

http://www.brucekalexander.com/articles-speeches/healing-addiction-through-community-a-much-longer-road-than-it-seems2

https://www.actualized.org/articles/overcoming-addiction

http://www.hopkinsmedicine.org/psychiatry/research/bpru/docs/caffeine_dependence_fact_sheet.pdf